Issu d’une formation artistique mais aussi grand autodidacte, Un gars dans la rue s’impose par son sens du détail.
Un touche-à-tout qui, par sa grande flexibilité, dynamise son environnement. Loin de l’univers contestataire du graffiti de ses débuts, Un gars dans la rue cherche à exprimer et non plus à dénoncer. C’est de l’art « en dehors », une envie de montrer que l’expression artistique n’est pas une pierre précieuse que seuls les grands peuvent admirer. L’art, c’est la liberté de prouver que ce dernier n’a pas de limites, quel qu’il soit.
Pourquoi un gars dans la rue ?
Alors ça c’est assez drôle, on m’a déjà posé cette question, c’est l’une des premières que l’on me pose. C’est simplement parce que je ne pose pas dans les champs, je ne fais pas du Street-art dans les champs. Je ne voulais pas mettre en avant mon nom sur ce que je fais dans la rue ou sur un tableau. Ce sont mes personnages, qui ont chacun leurs propres personnalités que je souhaite mettre en valeur. Il y a une vraie césure entre ce que je fais dans la rue et le reste. Un gars dans la rue c’est à la fois très descriptif et en même temps assez vague.
Qu’est ce qui t’as amené au Street art ?
En STI arts appliqués, j’ai appris les bases mais c’est vraiment avec des potes que tout a commencé. J’ai acheté des bombes, on faisait un peu les vandals à sortir le soir pour s’amuser. Puis j’ai eu un blaz et je me suis vite rendu compte que c’était trop narcissique, trop tourner vers soi. Ce n’est pas ce que j’aimais dans la rue, parce que quand tu te balades, tu ne sais pas sur quoi tu vas tomber. Ce qui me plait, ce sont les interactions que tu as avec ton environnement. C’est un univers très riche, parfois même un peu effrayant. C’est l’esprit que je voulais retrouver dans mon art. C’est pour cette raison que j’ai abandonné mon nom pour plus m’orienter sur des créations qui interagissaient avec les passants. J’ai gardé le graffiti comme base technique.
Pourquoi avoir privilégié la rue pour exprimer ton art ?
J’ai essayé pleins de supports différents mais il n’y a rien de plus excitant que la rue. Je crois que c’est le meilleur, il y a toujours une petite adrénaline. J’ai l’habitude de sortir seul, je me dis toujours que je vais me faire attraper. Il n’y a pas de cadre, de mise en scène comme dans une galerie. C’est vraiment ton œuvre face au monde. La démarche d’un artiste c’est de chercher à confronter sa vision à travers ses créations. La rue est l’endroit parfait pour ça. La plupart des gens vont détruire ce que tu fais, d’autres vont regarder, il y a une réelle curiosité. Il y en a même que ça va interpeler, qui vont chercher à savoir ce que tu fais. Cela créé beaucoup de richesse, c’est quelque chose que l’on ne retrouve pas ailleurs. Avec la rue tu ne maîtrises rien.
Et cela ne te dérange pas que tes œuvres soient éphémères, livrées à elles-mêmes ?
C’est drôle, lors de ma dernière session, j’avais posé quelque chose et à peine deux heures plus tard, deux jeunes l’ont déchiré. Mais c’était plus pour le plaisir de le déchirer. Forcément il y a un léger pincement au cœur, mais c’est passager. Je le vois davantage comme un cadeau, ou l’on ne se soucie pas de ce que va en faire la personne à qui on l’a offert. C’est de cette façon que je conçois le Street-art.
Quelles ont été tes inspirations au début ?
Quand j’ai commencé le Street-art, j’avais une démarche très engagé. On pourrait même dire assez naïve. J’apposais des affiches qui critiquaient l’acte de l’affichage sauvage. Je dénonçais la dégradation intempestive de l’affiche sauvage face à l’acceptation de la pub. Pourtant, il s’agit de la même chose. Il y a eu beaucoup de réactions à ça. Je dessinais des éclaboussures près des bouches incendie, ce genre de choses. Au fur et à mesure je me suis un peu calmé. Je me suis rendu compte que ce n’est pas comme ça que l’on s’adresse aux gens. Je me suis recentré pour savoir vraiment ce que je voulais exprimer. C’est de cette façon que les petits monstres que j’avais l’habitude de dessiné dans les marges de mes cahiers sont apparus. Je les utilise pour questionner, pour décrocher des sourires, c’est ce qui me plaît.
L’utilisation du verre est omniprésent dans ton travail, pourtant ce n’est pas un matériau facile à utiliser. Pourquoi avoir fait le choix de ce support ?
Dans la rue je recherche un travail que je peux faire à la maison et à la maison je recherche quelque chose que je pourrais faire dans la rue. L’utilisation du verre me permet de jouer avec la transparence pour interagir avec le mur. C’est ça qui m’intéresse, c’est que je fais sur le support, sur l’environnement même. C’est pour cela que je me suis mis à travailler sur le verre, un travail sur toile ou sur papier te sépare de ton œuvre. Lorsque je dessine, j’aime que les choses se mélangent.
Quel est ton point de départ lorsque tu te mets à penser à ta prochaine création ?
Souvent c’est parce que j’ai du carton à la maison et je souhaite m’en débarrasser (rire).
Lorsque l’on découvre ton univers, j’ai été surpris par le fait de ne pas retrouver certains codes emblématiques liés au Street-art tels que l’utilisation de bombes aérosols ou de messages contestataires. Quelle est ton interprétation du Street-art ?
Le fait d’utiliser le Street-art et même l’art en général pour crier son opinion sur tous les toits, comme j’ai pu le faire à mes débuts, me dérangeait. Ce n’est pas ça un dialogue. Un dialogue c’est être capable d’échanger sur un terrain neutre. Je trouvais ça dommage d’utiliser le Street-art comme un moyen d’imposer son point de vue à l’autre. Se positionner en disant « c’est pas bien ci, c’est pas bien ça » c’était prendre exactement le rôle de ceux qui dénoncent. Je me suis dis que c’était inutile, parce que je n’aimais pas moi-même que l’on me dise quoi penser, quoi faire. Prendre le parti de faire sourire les gens, me plaît davantage.
Comment s’est déroulée ta rencontre avec Family Drugstore ?
C’était sur Facebook, je venais de rencontrer un mec, on a commencé à discuter. Au fil de la conversation, il me dit « j’ai parlé de toi à Valérie, elle va te contacter » l’opportunité en or ! Ce type que je connaissais depuis trois messages, le hasard fait bien les choses. J’ai rencontré l’équipe, et lorsqu’ils m’ont présenté le concept je me suis dit « ça va être super fun comme projet ! ». J’avais vraiment hâte de commencer. La variété des supports proposés m’ont tout de suite beaucoup inspiré.
Tu es le premier artiste à t’être lancé dans la partie « custom », raconte-nous cette journée…
C’était vraiment excitant, ça s’est passé dans l’appartement de Valérie et Jérôme, un bel endroit ! C’était une sculpture de chien à la Jeff Koons, en résine. J’avais reçu l’objet quelques jours auparavant afin de pouvoir « l’apprivoiser ». J’ai pu voir les possibilités, j’avais pas mal d’idées assez drôle. Ce n’était pas la première fois que je personnalisais un objet donc je savais plus ou moins comment travailler mon style. Après, la contrainte c’était qu’il y avait beaucoup de cylindres et surtout, les uns sur les autres. Ensuite tout bêtement je me suis lancé, je me suis enfermé dans mon « monde ».
Quels matériaux as-tu utilisé ?
J’ai utilisé principalement le Posca et les crayons de couleurs. En fait, il y a une première couche à la bombe, puis je viens avec les crayons de couleurs pour travailler les nuances. Le Posca pour dessiner les lignes, souligner les mouvements et je termine par un vernis pour une touche Glossy.
Qu’est ce qui t’as intéressé chez Family Drugstore ?
Ce qui m’a attiré chez Family Drugstore c’est qu’il ne cible pas une population particulière. Ce n’est pas destiné à une niche mais réellement à toute la famille. Le fait de pouvoir acheter des produits industriels, faits en série et les rendre unique avec le choix de la personnalisation, je trouve ça vraiment intéressant. Chacun pourra avoir le même type d’objet mais avec sa petite dédicace. Ce n’est pas facile d’aller voir un artiste, de le trouver et de lui demander la création d’un objet. Grâce à ce concept-store, l’échange est simplifié et cela permet de rendre l’art « accessible », même si je n’aime pas employer ce terme. C’est aussi je pense, une formidable plateforme de lancement pour des jeunes artistes. En plus, on n’est pas limité dans notre univers, certes on a une palette de couleurs que le client a choisit mais on conserve notre liberté artistique.
J’aime le partage car on le fait en sachant qu’il faut que ça plaise au futur acquéreur. On est dans de l’artisanat, je le perçois plus comme une performance que comme une œuvre d’art.
Tu comptes garder ton anonymat malgré ta visibilité ?
Ah oui ! Je veux le conserver ! Après dans la vidéo, on voit mon visage mais je suis présenté comme « Un gars dans la rue » alors même si on me reconnaît, on ne sait pas mon nom. Ça crée des situations cocasses surtout lorsque je me trouve en dehors d’un contexte artistique. Les gens disent : « mais je ne connais pas son vrai prénom, c’est un gars dans la rue ». Le plus surprenant c’est qu’ils retiennent !
Propos recueillis par Alisson Devillers pour Family Drugstore.
« Un gars dans la rue » est un artiste que j’apprécie beaucoup!! J’aime son coté humain!! (ou plutôt monstrueux..)
Il y a une chose que je ne connaissais pas de lui.. le regard de l’artiste..
Le moment où on s’évade, on part dans son univers, notre intimité!!
Merci d’avoir partagé ce détail intense avec nous par cette vidéo!!
Cela me rappelle quand j’écris mes proêmes et que le bruit environnant rythmes alors le flot de mes maux et les émotions des gens la profondeurs de chaque lettre, chaque espace sans limite ni barrière!!
A tous les artistes en devenir, n’ayez pas peur de montrer qui vous êtes vraiment!!
Encore merci!! ;~?